La résilience climatique au Canada : une « maturité » pour l’adaptation ?

Auteurs):

Joanna Eyquem

Infrastructure résiliente au climat, Intact Centre on Climate Adaptation, Université de Waterloo

Directeur Général

Initiative sur les actifs naturels

Directeur du conseil d'administration

Clause de non-responsabilité : La version française de cet éditorial a été auto-traduite et n’a pas été approuvée par l’auteur.

L’adaptation climatique pourrait enfin arriver à maturité au Canada en 2023.

Alors que notre pays était sous le choc cet été des gros titres déchirants sur les communautés dévastées par de vastes incendies de forêt, les maisons détruites par les inondations et les personnes vulnérables souffrant d'une chaleur extrême, le gouvernement fédéral a publié la première stratégie nationale d'adaptation du pays[1], établissant une voie commune. vers un Canada plus résilient aux changements climatiques.

Avoir un plan est évidemment une première étape positive. Nous connaissons les problèmes et la stratégie comporte des objectifs clairs et des cibles quantifiées à court terme pour les résoudre, en termes de résilience aux catastrophes, de santé, de nature, d’infrastructures et d’économie. Désormais, tous les niveaux de gouvernement, les institutions financières et les entreprises doivent investir et agir sur le terrain pour réaliser cette vision commune.

Une plus grande urgence et un leadership plus fort sont nécessaires pour réellement piloter l’action d’adaptation.

L’un des obstacles réside dans le fait que l’adaptation au changement climatique est encore présentée comme une question environnementale au Canada – le ministère fédéral chargé de mettre en œuvre la stratégie est Environnement et Changement climatique Canada. Mais, comme je l'ai présenté à l'étude du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes en mai 2023[2], la réalité est que les impacts des changements climatiques sont plus durement ressentis sous forme d'impacts financiers et sanitaires.

Par exemple, si l’on considère les sinistres assurés catastrophiques, des pertes de 2 milliards de dollars sont désormais considérées comme une année « normale » au Canada (figure 1). Et ce qui n’est pas assuré est estimé à 3 à 4 fois ce chiffre. En termes de santé, 619 personnes ont perdu la vie dans le dôme de chaleur occidental en 2021[3] – des décès évitables grâce à l’adaptation.

Il est temps pour le gouvernement du Canada et le ministère des Finances de « mettre de l’argent sur la table » et d’investir dans l’adaptation, de confier la responsabilité centrale de la mise en œuvre et de travailler avec les gouvernements provinciaux et autochtones sur une approche coordonnée qui applique des pratiques exemplaires cohérentes dans l’ensemble. le pays. Cela comprend la coordination au niveau des foyers, comme un programme national d'engagement des résidents pour l'adaptation, jusqu'à la coordination à l'échelle du paysage, comme des approches régionales cohérentes à l'échelle nationale pour gérer les inondations fluviales et côtières.

Figure 1 : Sinistres assurables catastrophiques (milliards de dollars canadiens) au Canada, 1983-2022.
Les barres bleues représentent les pertes + les dépenses ajustées des pertes.

Nous devons être clairs sur le fait que l’adaptation ne consiste pas seulement à réduire les risques climatiques, mais à rendre les vies meilleures et plus sûres.

Nous devrions rechercher de multiples avantages de l’adaptation. Les gouvernements et le secteur privé ont déjà mis en place de solides programmes « verts » pour accroître l’efficacité énergétique et accélérer la réduction des émissions. Cependant, il est plus logique d’aborder ensemble différentes nuances de « vert » – intégrer l’adaptation au climat et des solutions positives pour la nature (beaucoup d’entre elles sont en fait de couleur verte !) dans les programmes existants est une opportunité clé pour les secteurs public et privé.

Par exemple, les bâtiments écologiques doivent aller au-delà du carbone et de l’efficacité énergétique. Actuellement, de nombreux programmes de certification « verts » (tels que Leadership in Energy and Environmental Design (LEEDTM) et d'autres administrés par le Conseil du bâtiment durable du Canada[4]) accordent peu d'importance à la résilience aux inondations, aux incendies de forêt et à la chaleur extrême, et encore moins à la résilience. des solutions mutuellement bénéfiques pour la nature et la biodiversité. De même, les programmes de rénovation des résidents, comme la subvention pour des maisons plus vertes, pourraient facilement inclure des mesures de résilience climatique, ainsi que faire participer les résidents à des actions qu'ils peuvent entreprendre eux-mêmes autour de leur maison, par exemple en utilisant les infographies « 3 étapes » du Centre Intact d'adaptation au climat.[ 5].

Il est également nécessaire de « verdir » les solutions d’adaptation au climat elles-mêmes.

La nature est notre alliée de première ligne dans la lutte contre les changements climatiques, mais la majorité des approches d'adaptation climatique au Canada se tournent immédiatement vers les solutions « grises » traditionnelles pour réduire les risques qui luttent contre les processus naturels (comme les murs anti-inondation) . Un examen[6] des projets financés dans le cadre du premier volet du Fonds d'atténuation et d'adaptation en cas de catastrophe du gouvernement du Canada a révélé que, sur 45 projets financés pour lutter contre les inondations des rivières, seuls 6 impliquaient des solutions fondées sur la nature. Il existe des opportunités clés pour combiner des solutions d'infrastructures naturelles et grises de manière à générer de multiples avantages pour les personnes et la nature, notamment pour la gestion des inondations et de l'érosion côtières[7], des inondations des rivières[8] et de la chaleur extrême[9].

Une façon d’intégrer les approches d’infrastructure qui fonctionnent avec la nature est de reconnaître officiellement la valeur financière des services fournis aux populations par les actifs naturels[10] (tels que les zones humides, les rivières, les forêts et les prairies). Les analyses de rentabilisation des mesures d'adaptation au Canada reposent souvent sur une comparaison des coûts avec les dommages évités aux propriétés et aux infrastructures, sans tenir compte systématiquement de la valeur économique des services écosystémiques fournis aux populations (comme le stockage, l'absorption et le ralentissement de l'eau et le refroidissement). nos villes), ou d'autres avantages sociaux (par exemple, frais de santé évités). Cela signifie que nous ne prenons pas de décisions économiques judicieuses lorsqu’il s’agit de sélectionner des solutions d’adaptation.

La bonne nouvelle est que nous disposons déjà de nombreux outils et guides pour nous aider à bien nous adapter, et d’autres sont en préparation.

Des normes, guides et outils pratiques sur la résilience climatique ont déjà été élaborés par de nombreuses organisations, notamment le Conseil canadien des normes[11], le Conseil national de recherches du Canada[12], le Groupe CSA[13] (ainsi que ma propre organisation, Intact Centre sur l'adaptation au climat[14] de l'Université de Waterloo). Ces outils ne valent cependant rien s’ils ne sont pas mis en œuvre. La communication, l’engagement et la mise en œuvre de solutions avec un sentiment d’urgence sont de loin le plus grand obstacle auquel nous sommes confrontés.

Je considère que l’adaptation climatique arrive à la fin de l’adolescence au Canada – nous avons de grands projets, nous avons des aspirations, et il est maintenant temps de « grandir » et de travailler dur pour les réaliser. Allons-y.

Bibliographie

1-https://www.canada.ca/en/services/environment/weather/climatechange/climate-plan/national-adaptation-strategy.html

2-https://www.ourcommons.ca/Committees/en/TRAN/StudyActivity?studyActivityId=12103385

3-https://www2.gov.bc.ca/assets/gov/birth-adoption-death-marriage-and-divorce/deaths/coroners-service/death-review-panel/extreme_heat_death_review_panel_report.pdf

4-https://www.cagbc.org/our-work/certification/

5-https://www.intactcentreclimateadaptation.ca/climate-ready-infographics/

6-https://www.csagroup.org/wp-content/uploads/CSA-Group-Research-Managing-Flooding-and-Erosion-at-the-Watershed-Scale.pdf

7-https://www.intactcentreclimateadaptation.ca/rising-seas-and-shifting-sands-combining-natural-and-grey-infrastructure-to-protect-canadas-eastern-and-western-coastal-communities/

8-https://www.intactcentreclimateadaptation.ca/managing-flooding-and-erosion-at-the-watershed-scale/

9-https://www.intactcentreclimateadaptation.ca/irreversible-extreme-heat-protecting-canadians-and-communities-from-a-lethal-future/

Séries 10-https://www.intactcentreclimateadaptation.ca/getting-nature-on-the-balance-sheet/

Séries 11-https://www.scc.ca/en/flagships/environment

Séries 12-https://nrc.canada.ca/en/research-development/research-collaboration/our-research-climate-resilient-buildings-infrastructure

Séries 13-https://www.csagroup.org/article/bridging-the-gap-in-climate-policy/

Séries 14-https://www.intactcentreclimateadaptation.ca/recent-reports/