Le Comité sénatorial publie son rapport complet sur une politique scientifique pour le Canada et formule des recommandations pour une organisation gouvernementale renouvelée

Publié le: Février 2023Catégories: Éditoriaux de la conférence 2022, Éditoriaux

Auteurs):

Paul Dufour

Paulicyworks

Directeur

Institut des sciences, de la société et des politiques publiques, Université d'Ottawa

Senior Fellow

Récipiendaire du Prix CSPC pour l'ensemble de ses réalisations

Paul Dufour

Aujourd'hui, l'économiste du Sénat formé à Harvard en tant que président du comité sénatorial spécial a présenté plusieurs recommandations clés au gouvernement Trudeau sur la façon de mieux renforcer la politique scientifique au sein du gouvernement. Le rapport examine des domaines clés tels que la réorganisation des ministères, les nouveaux conseils subventionnaires, l'amélioration des partenariats fédéraux-provinciaux, le renforcement de la R-D et de l'innovation industrielles et un rôle plus cohérent dans la collaboration internationale en S-T. Sont également incluses des suggestions sur l'amélioration du rôle du Parlement auprès de la science.

Le rapport de plus de 300 pages résume les résultats d'une série pluriannuelle d'auditions, de consultations et de témoignages sur l'orientation future de la politique scientifique et technologique du pays… Comme le note le Comité sénatorial :

Nous croyons que le gouvernement canadien ne devrait pas se précipiter pour apporter des changements organisationnels ou créer de nouvelles agences sur un coup de tête dans le domaine de la politique scientifique, sans avoir au préalable réfléchi et décidé des grandes cibles à atteindre et des stratégies à suivre… 

Cela dit, le rapport réévalue la nature et le rôle de l'appareil central de la politique scientifique canadienne, l'avenir d'un ministère d'État à la science et à la technologie, la nécessité d'un comité interministériel pour la science et la technologie et le mandat élargi pour le Conseil des sciences du Canada et les sociétés scientifiques.

Les sénateurs se prononcent sur la réorganisation des ministères et organismes, y compris les organismes subventionnaires, la recherche fondamentale intra-muros gouvernementale et l'aide à la R&D industrielle et à l'innovation, avertissant que le gouvernement doit poursuivre ses efforts en se prémunissant contre les conflits où il y a souvent :  le désir naturel de créer des baronnies rivales, chaque jalousie gardant son propre territoire et cherchant à étendre ce territoire aux dépens d'autres agences.

Le rapport soutient que : L'industrie a commencé à réaliser qu'elle pouvait mieux produire la technologie au service de l'éducation, de la santé et de la qualité de l'environnement… Les universités sont plus intéressées qu'elles ne l'étaient à contribuer de manière interdisciplinaire à l'effort de R&D menant à l'innovation sociale. Les gouvernements commencent à voir que l'organisation de la R&D sociale soulève des difficultés particulières car, selon la Constitution canadienne, les provinces sont les principaux innovateurs sociaux dans le secteur public. D'une part, il serait inutile et inefficace que chaque province organise et développe son propre effort global de R&D sociale. Par contre, le gouvernement fédéral ne peut assumer la responsabilité exclusive des programmes de R&D sociale.

Empruntant des idées à d'autres juridictions, le rapport examine divers modèles organisationnels pour la politique scientifique - pluraliste, action concertée et centralisée, soutenant que le modèle d'action concertée pourrait bien être la meilleure approche pour le Canada. car elle offre la meilleure opportunité de produire une politique pour la science et la science pour la politique.

Le rapport poursuit en plaidant en faveur de trois fondations distinctes pour soutenir la recherche universitaire. Les auteurs concluent que le soutien à la recherche en sciences de la vie, dont la biologie, a été relativement négligé et que le nom du Conseil de la recherche médicale devrait être changé et ses activités étendues à l'ensemble des sciences de la vie. De plus, une nouvelle fondation pour les sciences humaines et sociales distincte du Conseil des Arts du Canada devrait également être envisagée. Trois fondations sont nécessaires selon les auteurs de la commission sénatoriale, mais la nécessité d'une plus grande coordination entre eux est universellement reconnue. En effet, une liaison plus étroite est souhaitable pour assurer la complémentarité entre les services et la cohérence entre les programmes et pour favoriser l'interdisciplinarité. Un Conseil canadien de la recherche indépendant du ministère chargé de la science devrait également être mis en place. Un tel conseil :  donner à la structure de subvention plus de flexibilité et la capacité de changer et d'évoluer davantage dans le temps.

Le Comité sénatorial offre quelques orientations sur la question des relations internationales en science et technologie en précisant que : le gouvernement n'a pas donné au développement de ces relations (internationales) la priorité qu'elles devraient avoir en termes d'allocation des ressources et n'a pas établi la stratégie pour des réseaux d'information efficaces…..ni un nationalisme étroit ni le chauvinisme égoïste d'intérêt particulier des groupes seront d'une grande utilité ici. Même les superpuissances ne sont pas indépendantes des efforts de R&D des autres pays – ou de leur formation de scientifiques et d'ingénieurs. Le Canada, qui dans le passé a eu besoin d'un grand afflux de scientifiques et d'ingénieurs qualifiés, devrait être bien conscient de son interdépendance bénéfique et nécessaire avec les autres pays.

Constatant que le dialogue entre le Parlement et la science doit être amélioré, le rapport de la commission recommande qu'un groupe de parlementaires du Sénat et de la Chambre des communes soit organisé pour étudier les questions de politique scientifique et les programmes et opportunités soulevés par la science et la technologie et que, pour atteindre cet objectif, il soit autorisé à former une Association canadienne des parlementaires, Scientifiques et Ingénieurs, en collaboration avec des représentants d'organismes scientifiques et d'ingénierie.

Dans sa dernière section, le Comité sénatorial signale que de nouveaux modèles de décision seront nécessaires pour la politique scientifique, en particulier pour les programmes axés sur la mission. Comme il est dit,  il est clair qu'à mesure que le monde qui nous entoure change, la politique scientifique doit changer ; c'est-à-dire qu'il doit être dynamique. Une politique statique serait éphémère ; dans peu de temps, de nouveaux déséquilibres dans l'effort national et des rigidités dans nos institutions surgiraient, tout comme par le passé. La politique scientifique doit anticiper les changements dans l'environnement et y réagir de manière à ce que le Canada puisse utiliser au mieux la technologie et la science pour atteindre son plein développement et nous permettre de vivre une vie meilleure.

Source : Une politique scientifique pour le Canada : Rapport du Comité sénatorial spécial sur la politique scientifique, volume 3 , président; L'honorable Maurice Lamontagne, 1973