Reconnaître les travailleurs oubliés : redéfinir la formation supérieure et postdoctorale

Auteurs):

Tim Xue

Échange scientifique et politique

Bénévolat

Julia Messina-Pacheco

Échange scientifique et politique

Vice-président - Rédacteur

Gavin M.Douglas

Échange scientifique et politique

Coprésident

portraits de trois auteurs de cet éditorial
Clause de non-responsabilité : La version française de cet éditorial a été auto-traduite et n’a pas été approuvée par l’auteur.

Il est difficile d'imaginer une industrie où les salaires des travailleurs n'ont pas changé depuis 20 ans. Étonnamment, c'est la réalité pour les étudiants diplômés et (dans une moindre mesure) les boursiers postdoctoraux au Canada. Ces chercheurs gagnent des salaires qui signifient souvent qu'ils sont en dessous du seuil de pauvreté, qu'ils doivent endurer pour poursuivre leur passion pour la recherche. 

La différence entre les changements réels et attendus dans les bourses d'études supérieures en dit long, comme le montre le tableau ci-dessous sur la base des augmentations salariales moyennes à l'échelle nationale de la Banque du Canada :

Graphique montrant les prix des trois organismes au fil du temps.

L'appel à l'augmentation des bourses d'études supérieures et des bourses postdoctorales des trois organismes était l'une des nombreuses recommandations présentées dans le rapport du Comité consultatif sur le système fédéral d'aide à la recherche. Ce comité consultatif a été créé par le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie et le ministre de la Santé pour conseiller le gouvernement fédéral dans la modernisation du système de soutien fédéral à la recherche. Ce rapport soulignait ce que de nombreux étudiants diplômés et stagiaires postdoctoraux savaient depuis de nombreuses années : Le Canada manque de soutien pour la formation et le maintien de talents hautement qualifiés en recherche et en innovation. 

Avant ce rapport, un groupe de chercheurs de partout au Canada s'est réuni pour former Soutenez notre science (SOS), une organisation communautaire qui milite pour une augmentation de la rémunération des étudiants diplômés et des boursiers postdoctoraux au Canada. Dans un premier temps, SOS a soumis une pétition officielle (e-4098) au gouvernement du Canada le 8 août 2022, demandant l'augmentation du soutien fédéral au financement des études supérieures et postdoctorales. Une suite proposition prébudgétaire a été soumis au ministère des Finances préconisant une augmentation similaire. Cependant, tous les efforts ont été ignorés par le gouvernement du Canada lors de la rédaction de la Budget fédéral canadien 2023. Face au bilan décevant du Budget 2023, SOS a organisé et coordonné un débrayage national le 1er mai 2023, impliquant des étudiants diplômés et des stagiaires postdoctoraux de 45 universités à travers le Canada.

Il existe de nombreuses raisons possibles pour lesquelles le gouvernement du Canada ne s'attaque pas adéquatement à ce problème, mais nous croyons que l'une des principales raisons est que les représentants du gouvernement, et le public en général, n'apprécient pas pleinement la valeur que les chercheurs apportent au cours de leur formation. De plus, les activités académiques et non académiques exercées par les étudiants diplômés et les stagiaires postdoctoraux génèrent de nombreux avantages économiques et sociétaux, allant de la technologie verte aux remèdes contre les maladies, que nous développerons ci-dessous. 

Étudiants diplômés : pas les étudiants typiques

Malgré le fait qu'ils soient appelés « étudiants », les étudiants des écoles supérieures et professionnelles, telles que les facultés de médecine et de droit, ont des responsabilités et des programmes d'études très différents de ceux de la majorité des étudiants. On s'attend à ce qu'ils acquièrent et appliquent des compétences analytiques et interprétatives avancées pour rechercher des connaissances nouvelles et très spécifiques. Les connaissances et les compétences acquises sont essentielles pour générer des impacts économiques et sociétaux grâce aux innovations et aux découvertes faites en laboratoire, ce qui à son tour facilite la traduction et la mise en œuvre de la recherche ainsi que de meilleures politiques de recherche. De plus, pour compléter leurs revenus et parfois même comme une obligation afin de recevoir une allocation, les étudiants diplômés assument des rôles d'enseignement dans les cours de premier cycle et encadrent d'autres étudiants. Toutes ces responsabilités sont souvent assumées par travailler bien au-delà des heures de travail typiques à temps plein dans un établissement universitaire.

Peut-être plus important encore, les étudiants diplômés sont des contributeurs majeurs à la littérature scientifique. Ils passent des années à travailler sur des expériences, à analyser des données et à rédiger des articles scientifiques qui résument leur travail acharné. Étant donné que ces articles représentent une grande partie des publications scientifiques, le travail des étudiants diplômés est au cœur de l'écosystème de recherche canadien et soutient une partie importante du processus d'innovation au pays.

Stagiaires postdoctoraux : ils portent plusieurs casquettes

Alors que les étudiants diplômés, particulièrement dans les premières années de leur programme, sont encore en formation dans l'écosystème des sciences et de l'innovation, les stagiaires postdoctoraux (PDF) sont généralement des experts dans leur domaine. Ces personnes possèdent une vaste expérience du processus de recherche, qu'elles acquièrent en poursuivant des études supérieures supérieures. Un PDF est un expert dans un domaine de recherche spécifique où il fait progresser ses connaissances et ses compétences en menant plusieurs projets de recherche indépendants, en établissant et en coordonnant des collaborations, en rédigeant des subventions et des articles de recherche et en examinant des publications. En dehors de ces responsabilités principales, un PDF est également généralement un gestionnaire à temps partiel qui s'occupe de la logistique du laboratoire et de la coordination du projet, un mentor à temps plein dans la supervision et la formation des étudiants de premier cycle et des cycles supérieurs, et un technicien à temps partiel facilitant les succès de projets des autres en apportant leur expertise et leurs connaissances. Pour remplir toutes ces responsabilités, un PDF doit généralement fonctionner bien plus de 40 heures par semaine. Semblables aux étudiants diplômés, ces postes sont parfois perçus comme de la « formation », ce qui est en contradiction avec leur niveau de responsabilités dans une équipe de recherche, leurs connaissances et leurs compétences. Après tout, ils sont comme tous les autres professionnels : ils continuent d'apprendre tous les jours, améliorent leurs compétences et approfondissent leurs connaissances hautement spécialisées, et en tant que tels, ils ne devraient pas être considérés comme simplement en tant que "stagiaires". Bien qu'ils soient généralement traités comme des employés à des fins fiscales, leur statut professionnel varie d'un établissement à l'autre et ils n'ont généralement pas droit aux mêmes avantages que les autres employés de ces établissements. De plus, leurs salaires ou leurs bourses ne sont souvent pas suffisants pour leur permettre d'acheter une maison ou de fonder une famille, ce qui peut les dissuader de poursuivre une carrière dans la recherche.

Les travaux effectués par les étudiants diplômés et les stagiaires postdoctoraux devraient être mieux valorisés

Ici, nous avons brièvement survolé une liste non exhaustive de la façon dont les étudiants diplômés et les stagiaires postdoctoraux apportent de la valeur en plus d'acquérir eux-mêmes de l'expertise. La valeur de ces chercheurs ne doit pas être confondue avec celle des programmes de premier cycle : leurs contributions aux découvertes scientifiques s'apparentent davantage à celles des employés qu'à celles des étudiants, et leurs contributions sont d'une valeur scientifique et économique énorme. Ces découvertes se traduisent fréquemment dans l'industrie et dans de nouvelles entreprises, où nombre d'entre elles sont cofondées et dirigées par ces experts hautement qualifiés. En retour, ces nouvelles petites et moyennes entreprises, comme AbCellera Biologics, Notch Therapeutics et Acuitas Therapeutics (contributeur du vaccin Pfizer-BioNTech COVID-19), stimuler la création de nouveaux emplois pour les professionnels qualifiés qui font croître l'économie canadienne et la classe moyenne. Nous espérons que le gouvernement et le public en viendront à mieux comprendre ces dynamiques et que cela aidera les décideurs à mieux apprécier la pertinence des recommandations formulées dans le récent rapport du Groupe consultatif sur le Système fédéral d'aide à la recherche.