L'interventionnisme fédéral dans les politiques de santé : retour vers le futur ?

Publié le: mars 2019Catégories: Éditoriaux, Éditoriaux en vedette 2019

Auteurs):

Amélie Quesnel Vallée

Faculté des arts de l'Université McGill

Chaire de recherche du Canada sur les politiques et les inégalités de santé

Observatoire McGill sur les réformes en santé et en services sociaux

Directeur

Rachel Mc Kay

Observatoire McGill sur les réformes en santé et en services sociaux

Boursier postdoctoral

Isabelle Védel

Université McGill (médecine familiale)

Médecin et professeur adjoint

Observatoire McGill sur les réformes en santé et en services sociaux

Directrice associée (Associate Director)

Antonia Maioni

Faculté des arts de l'Université McGill

doyen

Amélie Quesnel-Vallée, Rachel McKay, Isabelle Vedel et Antonia Maioni

 

Les « Pères de la Confédération » du Canada étaient des hommes de leur temps, c'est pourquoi, entre autres, la « santé » n'était pas considérée comme une responsabilité première des gouvernements, et certainement pas du gouvernement du Dominion (Maioni et Smith 2003). Ce n'est pas surprenant, étant donné qu'à l'époque, les soins médicaux n'étaient pas particulièrement efficaces ni recherchés, et que les questions sanitaires et sociales étaient de nature locale, relevant de la famille, de la charité et des communautés religieuses. Comme ces hommes auraient été surpris d'apprendre qu'un siècle et demi après la Confédération, les soins de santé étaient devenus un symbole politique aussi puissant, un enjeu électoral saillant et un paratonnerre pour les tensions fédérales-provinciales. Il n'est donc pas étonnant que les soins de santé aient de nouveau été une question prioritaire pour les électeurs canadiens et pour les candidats politiques lors de la campagne électorale de 2015 et plus récemment dans le budget préélectoral (Morneau 2019).

Le Parti libéral du Canada, qui a longtemps joué un rôle crucial dans la politique de la santé, a en effet fait des promesses en matière de santé un leitmotiv de sa campagne électorale. En analysant ces promesses et la mesure dans laquelle elles ont été réalisées, de manière générale, nous constatons que les actions du gouvernement Trudeau en matière de politique de santé ont démontré un retour à une position plus interventionniste de la part du gouvernement fédéral, qui implique un pilotage plus délibéré des politiques provinciales de santé et la prestation de services sociaux grâce à l'évaluation des dépenses et des performances. Cela marque un changement significatif par rapport aux gouvernements conservateurs précédents (Kates 2014). Dans un contraste encore plus frappant, la rhétorique du gouvernement libéral semble chercher à étendre la portée de la Loi canadienne sur la santé aux nouveaux domaines des soins à domicile et de la santé mentale, comme la proposition du gouvernement libéral de dépenser 50 millions de dollars sur cinq ans pour soutenir une stratégie nationale sur la démence .

Et dans un geste encore plus audacieux, Pharmacare (c'est-à-dire un programme universel financé par l'État pour les médicaments sur ordonnance) sera probablement à l'ordre du jour de la prochaine plate-forme électorale. Bien que cela n'ait pas été explicitement abordé dans la plateforme du parti de 2015, les libéraux ont fait campagne en promettant d'améliorer l'accès aux médicaments sur ordonnance nécessaires (Parti libéral du Canada 2015). De plus, les deux derniers budgets de ce gouvernement ont énoncé des investissements concrets, suggérant que le gouvernement libéral a dépassé les considérations d'opportunité et de faisabilité et progresse délibérément et délibérément vers la formulation de politiques. À ce titre, le budget de 2018 a annoncé la création d'un conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments. Alors que le rapport du Conseil n'était attendu qu'à la fin du printemps 2019, un rapport provisoire a été publié quelques jours après le budget de 2019 (Hoskins 2019). Ce rapport provisoire énonce les principes fondamentaux des investissements annoncés le 19 mars 2019, soit la création d'une nouvelle Agence canadienne du médicament, d'un formulaire pancanadien et d'une stratégie nationale sur les médicaments onéreux pour les maladies rares (Morneau 2019). Les objectifs déclarés de ces initiatives sont d'harmoniser la couverture à l'échelle nationale et d'augmenter la rentabilité de la couverture grâce à des économies d'échelle et au pouvoir de négociation.

Ainsi, il semble que le gouvernement présentera une stratégie nationale d'assurance-médicaments comme promesse électorale lors de la campagne de 2019. Considérant le soutien de groupes de pression influents et le travail accompli à ce jour pour définir les options politiques, ils seraient alors en bonne position pour tenir ces promesses s'ils remportaient un second mandat. La Loi canadienne sur la santé incarne depuis longtemps le rôle du gouvernement fédéral en matière de soins de santé. Tant dans ses promesses que dans ses réalisations, ce gouvernement libéral a déployé ses muscles pour élargir la portée des services assurés publiquement à travers les provinces et montrer la voie en offrant une meilleure couverture de certains des mêmes services aux populations sous sa responsabilité. Cependant, bien que le renforcement de son engagement financier envers l'assurance-maladie soit une étape nécessaire, il est peu probable que ce soit une condition suffisante pour assurer le type d'impact structurel durable sur l'accès des Canadiens aux soins qu'un élargissement plus formel de la définition des services assurés permettrait d'obtenir. .

 

Références

Conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments. 2018. « Consultation nationale en ligne sur l'assurance-médicaments | Parlons santé. 17 septembre 2018. https://www.letstalkhealth.ca/pharmacare.

Casey, Bill. 2018. « Pharmacare Now : Couverture des médicaments sur ordonnance pour tous les Canadiens – Rapport du Comité permanent de la santé. Chambre des communes, Canada.

Hoskins, Éric. 2019. « Rapport provisoire du Conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments ». Conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments. https://www.canada.ca/content/dam/hc-sc/documents/corporate/about-health-canada/public-engagement/external-advisory-bodies/implementation-national-pharmacare/interim-report/interim- rapport.pdf.

Kates, David. 2014. « À l'expiration de l'Accord, Ottawa passe au second plan en matière de politique de soins de santé. O.Canada.Com, 16 mai 2014, art. Santé. https://o.canada.com/health-2/as-accord-expires-ottawa-takes-a-back-seat-on-health-care-policy.

Parti libéral du Canada. 2015. "Plate-forme de campagne électorale libérale : un changement réel - un nouveau plan pour une classe moyenne forte." https://www.liberal.ca/wp-content/uploads/2015/10/New-plan-for-a-strong-middle-class.pdf.

Maioni, Antonia et Miriam Smith. 2003. « Les soins de santé et le fédéralisme canadien ». Dans Nouvelles tendances du fédéralisme canadien, édité par François Rocher et Miriam Smith, Deuxième édition, 295–312. Peterborough : Broadview Press.

Morneau, Guillaume. 2017. « Bâtir une classe moyenne forte : Budget 2017 ». Gouvernement du Canada. https://www.budget.gc.ca/2017/docs/plan/budget-2017-fr.pdf.

———. 2019. « Investir dans la classe moyenne pour faire croître l'économie canadienne : budget 2019 ». Gouvernement du Canada. https://budget.gc.ca/2019/docs/plan/budget-2019-fr.pdf.

Bureau du directeur parlementaire du budget. 2017. « Coût fédéral d'un programme national d'assurance-médicaments ». Gouvernement du Canada. http://www.pbo-dpb.gc.ca/web/default/files/Documents/Reports/2017/Pharmacare/Pharmacare_FR_2017_11_07.pdf.