Science et lutte contre l’insécurité alimentaire mondiale : une histoire de réussite canadienne

Published On: November 2022Categories: 2022 Magazine, Canadian Science Policy Magazine

Author(s):

L’honorable Marie-Claude Bibeau

Ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire

Ce n’est pas d’hier que la science trouve des solutions aux grands défis mondiaux. Devant l’immense défi que représente l’insécurité alimentaire en ce moment, j’ai confiance en nos scientifiques et nos leaders d’opinion – ainsi que dans le riche écosystème d’innovation du Canada.

Selon les Nations Unies, près de 815 millions de personnes dans le monde souffrent de la faim. La situation est aggravée par les changements climatiques, la pandémie de COVID-19 et la crise en Ukraine, et nous ne sommes pas en voie d’atteindre l’objectif de développement durable « Faim Zéro ». Au contraire, deux milliards de personnes pourraient s’ajouter à ce nombre d’ici 2050, à moins qu’on ne transforme profondément la production alimentaire pour la rendre plus résiliente et durable. 

C’est là où l’expertise scientifique canadienne a un rôle indéniable à jouer.

Par exemple, en aidant à produire plus d’aliments avec moins de ressources. Au Ghana, un pays où l’insécurité alimentaire est élevée, le programme Gestion des nutriments 4B l’a bien démontré. Ce programme est dirigé par la Fondation de développement coopératif du Canada, en partenariat avec Fertilisants Canada.

Bafani Moses, un agriculteur de la région de Savanna dans le nord du Ghana, n’avait jamais entendu parler des principes 4B : le bon engrais, à la bonne dose, au bon moment, au bon endroit. 

Il a longtemps cultivé le maïs, l’arachide, le soja, le riz, le manioc, la patate douce et le haricot sans savoir comment bien utiliser les engrais. En pratiquant les principes 4B, il dit produire sur un acre de terre ce qu’il produisait sur cinq ou six acres dans le passé. 

Des formations ont été offertes à des agricultrices et agriculteurs dans différentes régions du Ghana, du Sénégal et de l’Éthiopie. Les rendements sont plus abondants et de meilleure qualité. Les familles peuvent se nourrir et même vendre des surplus, ce qui leur rapporte des revenus. 

Le réseau de scientifiques à l’origine des principes 4B est composé de chercheurs universitaires, de conseillers professionnels, de scientifiques d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) et de ministères provinciaux. Ils ont démontré qu’on peut produire des aliments avec moins de phosphore et d’autres ressources non renouvelables, tout en améliorant la santé des sols et en réduisant les émissions de GES de 35 %. 

Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Si le Canada est un leader de l’agriculture durable, on le doit largement à notre excellence scientifique. 

On le doit aussi à notre soutien à l’autonomie des femmes ici et dans les pays en développement. Nous aidons les femmes à accéder à l’éducation, aux innovations et à des débouchés économiques. Puisqu’à l’échelle mondiale, elles sont en grande partie responsables de nourrir leur famille, leur réussite en tant qu’agricultrices, entrepreneures et scientifiques est essentielle pour améliorer la sécurité alimentaire et atteindre la « Faim Zéro ». 

Dans les dernières décennies, les scientifiques d’AAC ont développé des techniques de sélection végétale qui ont permis de faire pousser certaines cultures dans des régions où c’était auparavant impossible. Les avancées dans l’analyse des données, l’agriculture de précision et d’autres technologies ont changé la donne pour l’agriculture canadienne. Des progrès dans les technologies post-récolte ont permis de prolonger la conservation des aliments, et donc de réduire le gaspillage. Récemment, des scientifiques d’AAC et des experts de Microsoft ont découvert le potentiel de l’agriculture en serre couplée à l’intelligence artificielle pour produire des aliments comme le concombre en utilisant moins de ressources. 

Les sciences et technologies agricoles aident aussi les systèmes alimentaires à mieux résister aux chocs, qu’ils soient de nature économique, agronomique, climatique ou géopolitique. 

Notamment, en rendant l’agriculture plus résiliente aux sécheresses, aux vagues de chaleur, aux ravageurs et aux maladies. Je pense par exemple aux nouvelles approches pour atténuer les agents pathogènes qui affectent les cultures, que les scientifiques d’AAC sont en train de développer en combinant technologies propres et biodiversité. 

L’avenir est là. Pour nourrir le monde aujourd’hui et demain, l’agriculture doit être plus durable. Résiliente et respectueuse sur le plan environnemental, concurrentielle sur le plan économique et responsable sur le plan social.

C’était exactement ce qu’on avait en tête en lançant la Politique alimentaire pour le Canada. On veut que toute la population canadienne ait accès à des aliments nutritifs et abordables. On veut que notre système alimentaire soit résilient et novateur, capable de protéger notre environnement, tout en soutenant notre économie. 

La Politique a déjà donné lieu à des initiatives qui ont obtenu du succès, dont le Fonds des infrastructures alimentaires locales, qui a financé plus de 820 projets au Canada, comme des jardins et des cuisines communautaires, des camions réfrigérés ou des unités d’entreposage pour les dons d’aliments. La Politique a aussi financé des initiatives communautaires pour relever les défis uniques des communautés autochtones et du Nord.

Les scientifiques d’AAC se sont engagés dans cette Politique. Ils ont trouvé des solutions novatrices pour diminuer le gaspillage alimentaire. Ils ont transformé les déchets du canola en biodiésel. Ils ont adapté l’extraction de la protéine lactosérique pour améliorer le rendement du fromage artisanal. Ils ont trouvé des solutions pour mieux préserver les aliments périssables pendant la distribution. Tous ces progrès contribuent à la résilience de nos systèmes alimentaires.

La science continuera de transformer le secteur agricole et agroalimentaire. Notre communauté scientifique est enrichie par la diversité de ses experts issus de différentes cultures, disciplines et perspectives. Elle sera appelée à poursuivre son travail pour mener la transition mondiale vers une agriculture plus durable. 

Et plus que jamais, la collaboration sera déterminante.

Un défi aussi complexe que l’insécurité alimentaire nécessite une approche plus collaborative, non seulement au sein de la communauté scientifique agricole, mais aussi parmi la communauté des climatologues, des spécialistes des ressources naturelles, des chercheurs en sciences sociales, des décideurs et d’autres intervenants. 

Après tout, c’est la collaboration qui fait le succès – et la renommée internationale – de nos laboratoires vivants. Dans plusieurs sites au Canada, scientifiques, producteurs agricoles, représentants de l’industrie et citoyens travaillent ensemble sur le terrain pour créer et tester des pratiques novatrices. 

Au cours de la prochaine décennie, le gouvernement s’engage à favoriser la collaboration intersectorielle et la créativité dans la communauté scientifique. AAC a un nouveau Plan stratégique pour la science axé sur quatre missions, qui orienteront le travail de différentes équipes. Grâce à la collaboration entre l’industrie, les universitaires, les producteurs et les communautés autochtones, ces équipes trouveront des solutions pour atténuer les impacts des changements climatiques, faire avancer l’économie circulaire, et plus encore. 

Nous puiserons également dans différents champs d’expertise scientifique pour élaborer notre nouveau Plan d’agriculture durable. En utilisant une approche fondée sur la science, on va déterminer les lacunes à combler et créer des indicateurs pour aider les agriculteurs à réduire leurs émissions, tout en restant productifs.

En plus de tout cela, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont conclu le Partenariat canadien pour une agriculture durable, une entente de 3,5 milliards de dollars pour soutenir le secteur, qui entrera en vigueur en avril 2023. 

Je repense à Bafani Moses et aux autres agricultrices et agriculteurs au Ghana, au Canada et ailleurs qui sont désormais plus résilients et productifs grâce à des scientifiques et des leaders d’opinion comme vous. Dans l’avenir, je sais que vous ferez progresser l’agriculture durable et la sécurité alimentaire chez nous et à travers le monde, et notre gouvernement sera là pour vous appuyer.